Le mois dernier, je vous expliquais comment j’ai participé à l’enregistrement d’une émission de radio pour parler de mon métier, accompagnée de deux consœurs de la région nantaise. Parce qu’une émission ne pouvait suffire à transmettre aux auditeurs tout ce que nous avions à dire sur le métier qui nous unit, Myriam Cabandé, Élisabeth Chauvin et moi-même avons poursuivi les échanges au cours d’une deuxième émission, diffusée le 5 octobre 2020. Voici le lien pour l’écouter et la podcaster. Le métier « d’écrivain public » n’est pas bien connu. On s’imagine généralement qu’un écrivain public est une personne qui rédige des courriers administratifs pour ceux qui ont des difficultés à le faire. Cela est vrai, mais un écrivain public fait bien plus que cela. Spécialiste de l’écrit, il est aussi biographe, correcteur, rédacteur, ou animateur d’atelier d’écriture. Cette fois-ci, Myriam Cabandé et Élisabeth Chauvin ont tout d’abord abordé plus précisément le métier de correctrice. Après avoir présenté les qualités qu’elles jugent nécessaires pour le réaliser (grande culture générale, extrême minutie, patience, etc.), elles ont discuté des outils qu’elles utilisent pour les assister et les types d’ouvrages qu’elles corrigent. Réalisant désormais des corrections de temps à autre, j’ai notamment pu aborder les travaux d’étudiants sur lesquels il m’a été donné de travailler, obligeant à une forme d’acculturation dans les domaines d’études concernés. Dans cet article, je vais cependant surtout vous parler de la réalisation de biographies, sur laquelle nous avons pu longuement échanger au cours de cette émission. Nous avons répondu à quelques questions courantes qui peuvent se poser en la matière. Qui sont les personnes qui veulent raconter leur histoire ?Nous nous sommes rejointes sur l’idée d’essayer de catégoriser les différents profils. Des personnes âgées motivées par leurs proches, à ceux qui souhaitent raconter leur carrière et parcours d’entrepreneur, en passant par celles et ceux qui cherchent à panser leurs plaies, faire passer un message fort ou relater une expérience de vie marquante et/ou douloureuse, les cas de figure sont divers. Bien souvent, nous constatons des différences de motivations et d’approches entre les femmes et les hommes. Quelles sont les qualités nécessaires pour être biographe ?Elles se résument en deux catégories, les qualités d’écriture et les qualités humaines. Les qualités humaines sont fondamentales, car, avant d’entrer dans l’intimité d’un conteur, une relation privilégiée doit s’être instaurée pour que celui-ci soit à l’aise et enclin à se confier. À mon sens, la chaleur humaine et la convivialité facilitent le processus. Être biographe, c’est aussi faire preuve d’une grande ouverture d’esprit et d’un non-jugement et avoir résolument le goût des gens et du grand âge. En parallèle, les compétences en écriture sont une évidence, car on est bel et bien là pour écrire un livre. J’ai cependant voulu ajouter une précision qui me semble essentielle pour bien comprendre notre métier. Les personnes qui font appel à un écrivain public – biographe pour rédiger leur récit de vie n’ont pas forcément une problématique d’écriture, elles ont surtout besoin d’être épaulées. Je me positionne toujours en coéquipière. Certaines ou certains pourraient tout à fait écrire leur vie eux-mêmes, mais la tâche est tellement fastidieuse, longue, qu’ils s’en sentent peu capables et sont découragé.e.s. Par où commencer ? Comment organiser, ranger, tous ces souvenirs enchevêtrés ? Quand on raconte sa vie, on est rapidement submergé par le flot des souvenirs, tandis qu’une personne extérieure aura le détachement, le recul pour organiser les faits et émotions. Quels sont les points de vigilance lorsqu’on exerce ce métier ?Mes consœurs et moi avons aussi abordé les points de vigilance, d’attention que nous devons garder à l’esprit lorsque nous écrivons la vie d’autrui. En se référant à l’expression populaire : « Les paroles s’envolent et les écrits restent », nous avons expliqué comment protéger le conteur de sa sincérité pour éviter qu’il blesse ses proches. Sans pour autant lisser le récit, nous devons savoir retirer ou reformuler des propos qui pourraient heurter la sensibilité d’un enfant, du conjoint, etc. En somme, il s’agit d’écarter du récit ce qui pourrait blesser l’autre.
Autre point de vigilance crucial : un écrivain public n’est pas un thérapeute, sauf si, bien sûr, il a la double compétence. Nous ne pouvons nier le fait qu’écrire sa vie a souvent une visée thérapeutique, cachée ou non, avouée ou non, et que le projet aura des effets sur le conteur. Cependant, ces effets doivent être dans la mesure du possible anticipés. C’est pourquoi, avant de m’engager auprès d’un nouveau client, je prends toujours le temps de m’assurer qu’il est plus ou moins en paix avec son passé, même si, de toute évidence, on ne peut jamais l’être totalement, et l’on ne peut déterminer à l’avance quelles seront les conséquences du travail d’écriture et de relecture chez le conteur. L’objectif est que le projet se passe bien pour le conteur comme pour le biographe. En pratique, certains récits de vie devront être mis en pause ou à l’arrêt parce que l’on ne peut se prémunir de tout. En outre, certains décident justement d’écrire leur vie pour avancer dans la digestion de leurs souffrances, et nous pouvons les accompagner lorsque la démarche est clairement définie. Parmi ceux-là, une partie d’entre eux se « soigneront » au cours du processus, et laisseront parfois un livre inachevé pour passer à autre chose. D’autres, à l’inverse, réveilleront les fantômes et se rendront compte que « c’était mieux avant », et qu’il est préférable de refermer les portes du passé. En conclusion, ce second moment d’échanges aura été tout aussi agréable que le premier. Quel plaisir de partager son quotidien avec deux autres écrivains publics passionnés ! Nous avons affirmé notre bonheur d’exercer ce métier magnifique. Un métier au cœur de la vie des gens, comme j’aime à le dire, et particulièrement enrichissant. Si certaines personnes souhaitent se lancer dans l’aventure, nous ne pouvons que leur conseiller vivement de le faire ! Pour en savoir plus, voici le lien de l’émission : https://www.radiofidelite.com/2020/10/05/ecoute-ecrit-vous-fait-decouvrir-le-metier-decrivain-public-2/. Je vous souhaite une très belle écoute ! Si vous vous posez encore des questions sur le métier, n’hésitez pas à me laisser un commentaire ! Et si, vous aussi, vous êtes écrivain public, je vous invite à me faire part de vos ressentis par rapport aux points que nous avons abordés !
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AuteurBribes d'histoires du quotidien d'une écrivain public - biographe, anecdotes et actualités. Archives
Novembre 2022
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